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«La cigale et la fourmi en version électrique, ça donne quoi?» (7) par Steve Tanner

15 juin 2023

Avec sa septième chronique de l’énergie, Steve Tanner ingénieur et président d’A Rocha Suisse poursuit son parcours autour de la transition énergétique que doit mettre en place notre société. Après avoir présenté le rôle de l’électricité dans cette transition (1), il propose aujourd’hui une réflexion sur le stockage de celle-ci, notamment durant l’été. A lire et à écouter ici !

Aujourd’hui, nous allons parler de la fable de Jean de La Fontaine : « La cigale et la fourmi » dans une version actualisée. Ecoutez plutôt : nos deux insectes ont l’électricité à la maison. La fourmi, prévoyante, a fait des réserves d’électricité pour l’hiver, mais la cigale se retrouve « à court de jus »…

 

Le stockage saisonnier de l’électricité

Cette analogie, un peu bucolique, nous permet de parler du stockage saisonnier de l’électricité. Si notre société veut utiliser le soleil comme source d’énergie pour la majorité de ses besoins en électricité, nous aurons un surplus énorme d’énergie en été, et une carence en hiver. Pile au moment où nous en avons le plus besoin ! Alors, pour ne pas se retrouver comme la cigale à devoir aller quémander des électrons chez les voisins, nous devons développer des moyens d’amasser cette électricité en été pour les mois rigoureux de l’hiver.

Les personnes qui possèdent des panneaux photovoltaïques sur leur toit savent que ces derniers produisent quatre fois plus d’énergie en été qu’en hiver. Si la Suisse atteint ses objectifs photovoltaïques, soit couvrir le quart de ses toits de panneaux, elle pourra produire près de la moitié de son électricité de cette manière, soit environ 30 terawatt heure. Mais une grande partie de cette production sera un surplus en été qu’il faudra stocker, sous peine de le perdre. On parle d’une énorme quantité d’électricité : près du quart de notre production annuelle !

 

Et les barrages ?

Certains nous diront : « En Suisse, nous avons les fameux barrages qui sont faits pour cela, non ? » Oui, mais les barrages d’accumulation des Alpes sont déjà bien utilisés aujourd’hui pour le stockage saisonnier ! Ils se remplissent en majorité avec les précipitations, et ne peuvent donc pas absorber en plus la future production estivale du photovoltaïque. On doit trouver d’autres manières de stocker l’électricité.

Nous entendons souvent que c’est là LE problème de la transition énergétique… C’est vrai, les moyens de stockage usuels comme les batteries ou le pompage turbinage ont une capacité de stockage limitée à quelques jours. Mais ils sont importants. Les batteries des voitures électriques, par exemple, peuvent absorber et restituer des puissances énormes et lisser la production photovoltaïque sur une journée avec un excellent rendement. Si on connecte au réseau le dix pour cent du futur parc automobile électrique suisse, soit 300’000 voitures, on a une puissance de charge et de décharge de l’ordre de 6 GW, soit l’équivalent de 5 centrales nucléaires, ou du double des capacités de pompage-turbinage actuelles de la Suisse. La voiture électrique est donc un élément central dans la transition énergétique, en absorbant les pics de production des énergies intermittentes et en les restituant quelques heures plus tard, pour la consommation ou les systèmes de stockage longue durée.

 

La solution : l’hydrogène

On se retrouve néanmoins au même point : la question du stockage de longue durée de l’électricité. Ce ne sont donc ni les batteries de voitures, ni le pompage turbinage, ni les barrages qui nous permettront d’assurer ce stockage. Et là, la pièce manquante de la transition énergétique a pour nom : hydrogène. Produite à partir d’électricité, l’hydrogène est une forme chimique de stockage de l’énergie, inépuisable, relativement facile à stocker en très grandes quantités, et très versatile dans ses usages. L’hydrogène est une brique de base pour synthétiser à peu près n’importe quelle molécule, depuis les hydrocarbures jusqu’aux engrais azotés, en passant par les plastiques. On peut l’utiliser dans la métallurgie pour atteindre de hautes températures, et on peut la reconvertir en électricité avec un rendement assez bon. Si on valorise la chaleur de sa production et de sa restitution en électricité, on arrive à un rendement bout à bout de l’ordre de 50 %, ce qui n’est pas si mal pour un surplus qu’on aurait dû jeter.

Pour reprendre la fable de Jean de La Fontaine, notre fourmi accumule l’été son électricité sous forme d’hydrogène pour passer l’hiver, mais elle utilise aussi la voiture électrique et le pompage turbinage comme stockage durant toute l’année.

En résumé, avec une utilisation judicieuse de l’électricité et l’ajout de capacités de stockage en hydrogène, notre société pourra passer des hivers sans manquer d’électrons. Mais pour le moment, le soleil brille et j’ai plutôt envie de faire la cigale ! A bientôt !

Steve Tanner
Ingénieur
Président de l’ONG écologique A Rocha Suisse

Note
1 Lire ou écouter les 6 autres dans l’encadré ci-dessous.

Ecouter la septième chronique de l’énergie de Steve Tanner: «La cigale et la fourmi en version électrique, ça donne quoi?»

 


Les 6 chroniques de l’énergie de Steve Tanner, président d’A Rocha Suisse

Voici les six chroniques sur l’énergie déjà diffusées sur Radio R :


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