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Bénédictions des mariages homosexuels par l’EERV: la réaction de Martin Hoegger, co-président du R3

25 novembre 2022

Le samedi 5 novembre, le synode de l’Eglise évangélique réformée du canton de Vaud (EERV) a mis sous toit la bénédiction de tous les couples hétéros ou homosexuels. Dorénavant, cette Eglise bénira tous les couples au bénéfice d’une reconnaissance civile, quelle que soit leur orientation sexuelle. Le R3, le Rassemblement pour un renouveau réformé, s’est opposé à cette mise en place. « Un R d’Actu » a reçu l’un des présidents de ce mouvement, le pasteur Martin Hoegger. Une interview à écouter ou à lire.

Martin Hoegger, vous êtes le président du R3, un mouvement, pour faire court, proche des convictions évangéliques. Comment votre mouvement réagit-il à la mise en place du mariage pour tous dans l’Eglise réformée vaudoise ?
Le R3 a publié une Déclaration au lendemain du Synode de juin de l’EERV pour affirmer deux choses. D’abord qu’il reste attaché à la définition de la bénédiction du mariage telle qu’énoncée en 2013 par le Synode de l’EERV comme « l’invocation de la bénédiction divine sur un homme et une femme », telle qu’enseignée dans la Bible et confirmée par Jésus-Christ : « N’avez-vous pas lu qu’au commencement, le Créateur fit l’homme et la femme ? » (Matthieu 19,4).

Puis le R3 s’interroge sur la rapidité avec laquelle le synode de l’EERV, par sa décision, a renoncé à cette définition pour se conformer à l’évolution sociale, au lieu de chercher un discernement qui respecte la diversité des compréhensions du mariage au sein de l’EERV. En 2013, l’EERV a défini le mariage, pour la première fois dans son histoire, comme l’union d’un homme et d’une femme. Moins de neuf ans plus tard, elle en donne une définition radicalement nouvelle. Est-ce par souci de vérité ou suite à la pression sociale ?

Certains membres du synode de l’EERV, proches du R3, ont démissionné à la suite de la décision de juin dernier. Combien ?
A ma connaissance deux membres ont démissionné. Un troisième prévoit de le faire.

Pourquoi ?
Surtout pour des questions de procédures. Ils ont protesté au sujet du caractère unilatéral des documents préparatoires au synode, clairement en faveur d’une bénédiction du mariage des personnes de même sexe. Ils ont constaté aussi qu’un débat de fond n’a pas eu lieu, vu qu’ils n’ont pas eu l’occasion de présenter leur position de manière équitable. Seule la position favorable a vraiment eu voix au chapitre (voir l’article : « Mariage pour tous : pour un débat équitable dans l’EERV ! » ).

D’autre part, ils auraient voulu que le peuple de l’Eglise soit consulté. En 2006, 90% des réformés n’étaient pas favorables à la bénédiction d’un mariage de personnes de même sexe, à la suite d’une consultation des paroisses de l’EERV.

A titre personnel, comment réagissez-vous suite à l’adoption définitive de samedi 5 novembre ?
A nouveau, ce synode montre la nécessité de réfléchir sur le sens de la synodalité. Un synode n’est pas simplement un parlement. Et la temporalité de l’Eglise n’est pas celle de la société. Nous ne sommes pas des conservateurs opposés à toute évolution, mais il faut accueillir tout avec discernement, comme nous y appelle l’apôtre Paul quand il appelle à « examiner toute chose et à retenir ce qui est bon ». Et ce discernement dans la démarche synodale prend beaucoup de temps, ce qui n’a pas été le cas dans les décisions sur le mariage pour tous, prises hâtivement par les Eglises réformées en Suisse.

Quelles vont être les répercussions d’une telle décision sur les relations avec les autres Eglises ?
J’ai été le responsable de l’œcuménisme dans l’EERV durant plus de 10 ans. J’ai donc un fort engagement œcuménique. De plus, j’enseigne actuellement la théologie œcuménique à la HET-PRO, la Haute Ecole de théologie à St-Légier. Je constate avec tristesse que l’EERV et d’autres Eglises protestantes en Suisse (et ailleurs surtout dans l’hémisphère nord) se distancient des Eglises catholiques, orthodoxes et évangéliques sur cette question. Elles ajoutent ainsi des obstacles à la communion ecclésiale.

Cette division est une grande douleur. Tout est douloureux dans cette affaire. Je n’oublie pas non plus la souffrance des personnes homosexuelles ou homosensibles. Mais il ne faut pas fuir la douleur, ni la passer sous silence, ou encore la relativiser. Il faudra vivre sans doute avec ces tensions dans les années à venir.

Pour moi, seul le regard sur le Christ crucifié, qui a assumé toutes nos divisions, donne une espérance et ouvre un chemin de réconciliation. Mais, pour cela, il faut aimer sa croix… Ce qui n’est pas très populaire aujourd’hui !

Après une telle décision, comment voyez-vous l’avenir de votre mouvement dans le cadre de l’Eglise réformée ?
Il y a trois semaines, le R3 a organisé une soirée avec ses membres et ses sympathisants. Nous avons dit que nous n’avons pas une approche politique, mais prophétique. Pour l’approche politique, si on ne gagne pas, on a perdu ! Pour l’approche prophétique, l’essentiel consiste à transmettre le message que Dieu nous confie. On voit cette dimension chez le prophète Ezéchiel (2,3-7) à qui Dieu demande de parler : « Tu leur diras mes paroles, qu’ils écoutent ou qu’ils n’écoutent pas. » Il nous a semblé que Dieu nous demandait de parler, qu’on soit écouté ou non. C’est ce que nous avons essayé.

Maintenant que la décision du synode a été prise et que nous n’avons pas été écoutés, nous avons décidé de tourner la page. Ceux qui ont pris cette décision devront assumer les conséquences d’une telle décision qui nous semble contraire à l’Ecriture et la tradition chrétienne.

Lorsqu’on voit les pasteurs qui signent les prises de position du R3, on a l’impression que ce sont uniquement des pasteurs retraités. Votre mouvement est-il constitué – excusez l’expression ! – d’une « arrière-garde réactionnaire » ?
C’est une fausse impression ! Il y a plusieurs jeunes pasteurs et diacres dans notre association. Ils ne sont pas issus seulement de l’EERV, mais aussi des autres Eglises réformées de Suisse romande, car le R3 a une dimension romande. Ce courant spirituel est d’ailleurs présent dans les Eglises réformées en Suisse allemande, comme dans les Eglises protestantes de toute l’Europe. Il est vécu dans des paroisses très dynamiques, lesquelles attirent beaucoup de jeunes. Je participe aux activités de l’une d’elles, au Mont-sur-Lausanne.

Est-il possible comme jeune pasteur de se profiler à vos côtés ? Ou encourt-on des sanctions ?
Il est effectivement plus difficile à un jeune pasteur de se profiler qu’à un retraité. Mais j’espère que Dieu suscitera des jeunes hommes et des jeunes femmes courageux qui sauront poser avec intelligence les bonnes questions et défendre le contenu de la foi. Le sens de la conjugalité et de la famille est-il secondaire ou fait-il partie du contenu de la foi ? Pour moi, c’est clairement une question de foi. La création de l’homme et de la femme appelés à se rencontrer fait partie du premier article de la foi sur la création. Redéfinir le mariage touche à cet article fondamental.

L’Eglise réformée vaudoise est-elle vraiment aussi pluraliste qu’elle l’affirme souvent ?
Je n’aime pas le mot « pluralisme ». Je préfère celui de pluralité. Le pluralisme inclut des énoncés contradictoires alors que la pluralité inclut des énoncés complémentaires. Le pluralisme veut nous faire croire qu’il est tout à fait légitime dans une Église d’avoir des conceptions contradictoires sur la bénédiction du mariage. Ce qui, à mon sens, sape son témoignage.

Cela dit, il y a une forme de pensée unique qui s’est infiltrée dans l’Eglise réformée à ce sujet, et il devient de plus en plus difficile de questionner l’idéologie LGBT.

Transcription libre de l’interview d’« Un R d’Actu » diffusé le 23 novembre sur Radio R.

Ecouter l’émission « Un R d’Actu » du 23 novembre avec Martin Hoegger, pasteur retraité et co-président du R3:


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