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Claude Villard : « Lève-toi et marche ! »

12 septembre 2021

Peut-on avoir une vie comblée malgré un handicap ? Né avec une malformation des deux bras, Claude Villard est traducteur, comédien, metteur en scène, écrivain et prédicateur. Sa passion est d’encourager tous ceux qui pensent que la vie ne les a pas gâtés. Sa devise : être différent, c’est être extra-ordinaire !  A découvrir dans une « Célébration » ou par écrit !

Je m’appelle Claude et je suis né avec une particularité : mes bras sont environ deux fois plus courts que la normale et je n’ai que trois doigts. Je ne sais pas si vous réussissez à imaginer à quoi ça ressemble. Pour faire des selfies par exemple, ils sont trop courts ! Il y a donc des situations, des contextes où je suis un peu… disons handicapé !

« Moi, gardien de but ! »
Autre exemple : j’avais 12 ans et je me souviens très bien d’une heure de sport au lycée. Le prof avait annoncé qu’on allait jouer au foot, j’en étais très heureux parce que j’adorais jouer au foot. Pour commencer, il a eu besoin de deux volontaires pour jouer dans les buts. « Qui veut être gardien de but ? »
Qui a levé le doigt en premier ? Eh bien, c’était moi. Moi, avec mes bras trop courts, je voulais être gardien. J’étais toujours en admiration devant les gardiens de but. Je trouve ça génial quand un gardien plonge, quand je vois ça à la télévision, surtout dans les ralentis. Et j’ai toujours rêvé d’être gardien de but, de plonger comme lui, de rattraper toutes les balles.
Et quand le prof a donc demandé qui veut être gardien, forcément j’ai levé le doigt et j’ai dit : « Moi ! » Ce qui est surprenant, c’est que le prof de sport ne m’a pas dit non. Il ne m’a pas dit : « Claude, tu ne peux pas faire ça; ça ne va pas marcher ». Non, je me souviens d’une réaction assez neutre. « Bon, viens, tu seras gardien. » Comme si c’était la chose la plus normale. Et voilà donc que j’étais gardien de but.
Ce n’étaient pas des grands buts comme on les voit sur les terrains de foot. C’étaient des buts de handball. Ils font environ 2 m de large, mais tout gamin que j’étais, ils me semblaient très grands.
On commençait à jouer, j’étais tout content d’être dans les buts. Après cinq minutes on perdait déjà deux à zéro. Je n’étais pas du tout conscient que c’était en grande partie à cause de moi. À ce moment-là, le prof de sport me propose quelque chose. Il me dit : « Claude, tu vas changer de poste, tu vas jouer en défense. » Il ne m’a pas dit : « Claude, tu es nul ». Il m’a simplement proposé de jouer à un autre poste. Et ce jour-là, j’ai joué défenseur et je dois dire que je me sentais un peu mieux.

« Puis attaquant ! »
Plus tard, j’ai joué attaquant et j’ai commencé à marquer tout plein de buts. Pendant toute ma scolarité, quand je jouais au foot, j’étais attaquant. Même en vacances, quand je faisais des tournois de foot à la plage, je marquais tout plein de buts et je m’éclatais.
Et aujourd’hui je me dis que tout ça, c’est grâce à un prof de sport qui n’a pas dit que j’étais nul dans ce que je faisais, mais qui m’a simplement ouvert une nouvelle perspective et encouragé de faire autre chose. Dans ce cas, il n’est question que de sport, de foot. Mais je pense que cela peut s’appliquer à tout ce qu’on fait dans la vie.

Une histoire d’attitude face à son handicap
C’est un peu comme cet homme dont il est question dans les Évangiles. C’est une histoire qui me touche beaucoup, parce qu’il est question également d’une personne handicapée, mais dont le handicap est beaucoup plus lourd que le mien, puisqu’il ne peut pas bouger du tout. Moi, je peux marcher. Mais lui, il est assis, il est allongé, il est paralysé. Mais son problème, ce n’est pas seulement le handicap en soi, mais son attitude vis-à-vis de son handicap.
Quelle est sa situation ? Cet homme se trouve à proximité d’un bassin public dont l’eau bouge à certains moments. Et quand l’eau se met à bouger, le premier qui réussit à entrer dans l’eau est guéri. Ceux qui peuvent bouger, marcher et courir ont forcément un avantage par rapport à ceux qui sont paralysés, qui ne peuvent pas bouger. Alors j’imagine que, lorsque l’eau se met à bouger, c’est une véritable ruée vers l’or, chacun essaye d’être le premier. Chacun essaye de jouer des coudes, s’il en a! tout ça pour être le premier.
L’espoir, ce n’est que pour ceux qui peuvent bouger, qui peuvent marcher. Or justement, cet homme ne peut pas marcher, ne peut pas bouger. En d’autres termes, il n’a aucune chance d’être le premier. Quand il entend l’eau bouger, c’est une lueur d’espoir. En même temps, c’est une terrible frustration, parce qu’il sait qu’il ne peut pas y arriver.
Ça fait près de 40 ans qu’il vit selon ce même schéma. Ça fait 40 ans qu’il vit dans cette frustration. Mais ça change le jour où quelqu’un vient de l’extérieur pour lui ouvrir une nouvelle perspective. Les Évangiles racontent que Jésus le voit et lui pose cette question, qui semble presque stupide tellement la réponse est évidente : « Veux-tu être guéri ? » Alors au lieu de répondre : « Évidemment que je veux être guéri, ça fait 40 ans que j’attends ça », cet homme va se plaindre et dire qu’il n’a personne pour l’aider.
Ce que cet homme voit, ce n’est pas tellement son handicap, mais c’est plutôt la situation dans laquelle il est. Il se plaint du contexte dans lequel il vit. Ce sont les autres qui sont coupables de sa situation. Il met l’accent sur sa frustration.
Et c’est là que Jésus prononce cette phrase devenue si célèbre. Il ne lui dit pas : « Viens ! Je vais te donner un coup de main », car ce serait une aide, certes, mais à court terme. Jésus lui dit : « Lève-toi et marche ! » Jésus ne s’attarde pas sur sa situation. Évidemment, il la prend en compte dans toute sa mesure, dans toute son épaisseur. Mais il lui demande d’aller au-delà de cette limite.
C’est un peu comme si Jésus lui disait d’arrêter de se fixer sur ce qu’il n’a pas, de se fixer sur ce qu’il n’est pas. « Concentre-toi plutôt sur ce que tu as, concentre-toi sur ce que tu es. Je vois que ta vie n’est pas limitée à la situation actuelle qui est de rester sans bouger à cet endroit qui ne t’apporte que des frustrations. Il y a plus que ça. N’attends pas que quelqu’un agisse à ta place ! N’attends pas que quelqu’un prenne une décision à ta place ! N’attends pas que quelqu’un d’autre pense et réfléchisse à ta place ! Mais agis toi-même ! »
Je pense que cet homme était bien sûr paralysé physiquement, mais qu’il était surtout paralysé dans son cœur. Il était tellement enfermé dans sa frustration, son amertume, sa déception, son sentiment d’injustice, que son cœur s’était refermé et paralysé.

« Essaie quand même ! »
Il y a bien sûr des limites qui sont naturelles, objectives. Je ne pourrais jamais être un gardien de but ou jouer au rugby. J’aurais du mal à jouer au volley ou au basket. Ce sont des limites naturelles. Même si, plus tard dans mon adolescence, j’ai eu un prof de sport qui m’a encouragé à faire du basket et du handball. Je lui ai pourtant dit que je ne pouvais pas jouer au basket. Il m’a tout de même encouragé à essayer de le faire. « Essaye, et tu verras si ça marche ou si ça ne marche pas. » J’ai essayé. C’était difficile parce que la balle est lourde ! Et je me suis rendu compte où était ma limite.
Ce que je veux dire, c’est que nous avons bien sûr des limites naturelles, objectives. Mais nous avons aussi beaucoup de limites que nous pourrions franchir, ou du moins repousser. Parce que ce sont des limites que nous nous imposons, que nous imaginons, ou qui n’existent peut-être que dans notre tête. Et il suffit que quelqu’un vienne de l’extérieur et dise : « Essaye quand même ! »
Je crois que nous avons tous besoin de quelqu’un qui vienne de l’extérieur pour nous encourager, pour nous donner une nouvelle perspective, pour nous présenter une nouvelle façon de voir les choses. Ou qui nous dise : « Je vois, je sens que tu es capable de beaucoup plus. »
« Lève-toi et marche ! »
Claude Villard

 


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